Qui pour voler au Ciel eut assez de courage... [PV Kensei]

Aux profondes notes de la basse battaient les coups de patins. Des coups légers et maitrisés qui épousaient la forme du parcours que Kenji visualisait. Une route sinueuse qui évite tous les obstacles, parfaitement fluide, sans mouvement brusque, comme l'eau sur la feuille. Comme le sang sur la peau. Ses coups de patin si doux et si contrôlés sont les vestiges des rasoirs, des crocs, qu'ils étaient. Eux qui brisaient la nuit avec leurs sillons rouge écarlates d'ailes de Fang Rider, ne sont plus qu'une poudre oubliable d'un citoyen japonais quelconque. Citoyens qu'il passe sans prendre en compte leur existence, leur humanité, leur libre arbitre. Il ne faisait que passer, les frôler, les anticiper, comme de simple poteaux mouvants. Cette sensation grisante de fierté, de liberté, de pouvoir... de supériorité et de savoir.

La mémoire musculaire prit le dessus, comme un vieil ami qui rentre chez vous. Les patins battaient la mesures du rythme puissant des percussions qui tapissaient ses tympans. Les mêmes musiques qui parcouraient sa cervelle depuis qu'il parcourait les rues sombres de Tokyo chaussé sur ses AT's. La mémoire musculaire combinée à la mémoire auditive plongea Kenji dans son passé, gorgée d'évènements, de batailles, de fêtes, de joie et de colère. Chaque pied en avant un pas de danse, chaque torsions une figure au son de ces quelques notes de piano.

Non il n'avait pas oublié. Ni comment rider, ni comment parcourir la ville, ni comment atteindre le ciel. Mais se remémorer son passé c'est un truc de vieux, vous ne pouvez pas vraiment comprendre ce moment de nostalgie. Quand vous arrivez au Big Bird, que vos oreilles sont envahis par les sons de votre adolescence, que vous sentez les moteurs sous vos pieds et que vos narines s'emplissent d'odeurs de gomme, ce mélange de sens vous enivre.

Kenji aimait parcourir et redécouvrir ce qui avait été son territoire, même si sa nouvelle notoriété l'empêchait d'apprécier les paysages de jour elle ne le gênait que peu la nuit. Il était heureux de prendre quelque photo avec les riders nocturnes et ne cachait pas son identité. Portant un survêtement avec le logo des Galaxy dans le dos, les AT officiels de la marque et sa tronche atypique il était facilement reconnaissable. Kenji aimait affirmer sa place dans ce milieu dont il était surement le doyen. Les jeunes le prenait surement pour un vestiges des temps passé, comme une statue ou un temple d'Edo. Mais pratiquer au milieu d'eux lui rendait sa gloire et son brillant d'antan. Deux jeunes lui proposèrent une partie de Disque avec un air légèrement prétentieux qui voulait surement dire "on va lui montrer au grand père". Tout se passa très vite, une interception et il ne lui fallut que quelques seconde pour ramener le disque dans son camp. Une feinte, un freinage et une vrille fit même cracher quelques flammes de ses roues pour dessiner un cercle autour de son opposant. Faire naitre des flammes n'était pas sa vocation première, mais il avait essayé de s'approcher de ce qu'on appelait la Flame Road lors de son changement de poste. De la vitesse nait la puissance et de la puissance nait les flammes, c'était pas très compliqué. Il laissa les deux jeunes sur place avec une photo comme souvenir de leur humiliation.

Cette petite démonstration ne l'empêcha pas de faire quelque tours de terrain les yeux fixé sur son téléphone, parcourant les rampes, les half-pipes comme s'il parcourait un jardin zen pour finir à la fontaine d'eau.
Le centre était vide, mais il devrait se passer quelque chose. Il se passe toujours quelque chose dans le Nightmare, heu pardon dans Utopia.